Jour 41 : Remise en état de la voiture

Karim le peintre est encore plus matinal que moi !

De bon matin, je me dirige vers le garage et je tombe sur un parking où des dizaines de mobylettes stationnées attendent le réveil de leurs propriétaires.

J’arrive à 7h pile et Karim est déjà devant l’entrée en train de parler à un groupe de 3 ou 4 personnes.
Quand il me voit, il se précipite vers moi vêtu d’un pantalon à pince couvert de peinture et il est fier de m’annoncer qu’il a déjà passé 2 couches à l’AX et qu’il ne reste plus qu’à appliquer le vernis. Il ajoute qu’il a eu de nouveaux clients hier soir et qu’il devait commencer plus tôt que prévu pour finir dans les temps.

A cette heure-ci le garage est désert, on entre et je suis tout impatient de voir ce que ma petite AX donne en violet. La voiture est déjà méconnaissable !

Chaque partie qui n’était pas à peindre a été recouverte de ruban adhésif et de papier journal, le souci du détail de Karim est tout simplement hallucinant. Même l’orifice du lave glace n’a pas été oublié !
De plus la peinture a été faite à l’intérieur des portes et même sous le capot !! J’ai rarement vu une telle rigueur en Afrique surtout quand il s’agit de retaper une voiture.

Je file à l’ambassade du Burkina pendant que ça sèche

Karim me prévient que dans 1 heure et demie la peinture sera prête à recevoir le vernis, j’ai donc le temps de foncer à l’ambassade faire ma demande de visa.

Je trouve facilement un taxi et lui demande le quartier ACI 2000, ambassade du Burkina. Comme au Sénégal et en Mauritanie il faut négocier le prix avec le chauffeur. Je ne connais malheureusement pas les tarifs de Bamako. Il me propose 2000 Fr CFA, et sachant que partout en Afrique un taximan doublera (au moins) le prix de la course à l’approche d’un blanc, je lui donne 1000 Fr CFA qu’il accepte.

ACI 2000 est un quartier récent de Bamako, on y trouve beaucoup d’ambassades. Celle du Burkina est un peu cachée et on galère pour la trouver. Elle se situe juste à côté de celle de Libye qui est une véritable forteresse avec caméras de surveillance dans tous les coins et des gardes tout autour !

Je présente mon passeport à l’entrée et précise que je suis là pour un visa Burkinabé puis on me prit évidemment de me rendre aux services des… visas. Je dois remplir 3 formulaires, fournir 3 photos d’identité et payer la modique somme de 30000 Fr CFA (46€). Le visa est délivré l’après-midi et sera disponible à partir de 14h30 au même endroit.

En sortant je retrouve le taxi qui m’avait proposé de m’attendre et on repart vers le quartier de Niaréla où se trouve Karim et son garage.

Me revoilà au garage, Karim est toujours seul et peint d’autres véhicules. Il travaille chaque jour pendant des heures sans masque ni aucune autre sorte protection. Je suis placé légèrement en retrait et les vapeurs de peinture me font déjà mal au crane. Je n’ose pas imaginer ce qu’il déguste même s’il déclare être habitué…
C’est l’heure d’envoyer le vernis sur ma voiture. La couleur avait un joli rendu mat mais il faut avouer que le vernis donne un coté brillant vraiment très réussi.

Soumaré arrive, il tient à voir le bon déroulement des choses. Karim me dit qu’il va falloir attendre au moins 4 heures avant de commencer les décorations si on ne veut pas gâter la peinture. Pendant ce temps il essaie de contacter son collègue qui se chargera de cette partie du travail mais ce dernier ne répond pas.

Petit cours de bambara et repas insolite

Soumaré qui est Soninké et Karim qui est Malinké m’apprennent quelques notions de Bambara, ethnie majoritaire du Mali qui a imposé sa langue dans le pays. Ils ont tous les 2 un accent très différent et par conséquent ils ne prononcent pas les mots de la même façon. Je répète laborieusement après eux ce qui les fait bien rire.

L’heure tourne et on commence à avoir faim, je pars chercher du mouton grillé avec Soumaré. A notre retour on dispose ça dans un plat et le contact de Karim, surnommé « l’anglais », qui doit m’écrire l’adresse du site internet sur la voiture arrive enfin. Il a amené du riz au poisson avec lui et on mélange ca à la viande puis on déguste ça à main nue au milieu du garage.
Dibiterie mélangée à du thieboudienne, les sénégalais qui liront ca vont grincer des dents !!

En Afrique on ne boit pas en mangeant mais après avoir terminé le plat.
L’apprenti dont j’ai oublié le nom nous amène des poches d’eau fraiche que l’on boit d’une traite. Il fait très chaud en ce moment et les gens le savent, l’eau qui est quasiment glacée pour le moment sera imbuvable dans 5 minutes.

Je fais un allez retour rapide pour récupérer mon passeport. Je peux désormais entrer et rester au Burkina Faso pendant 3 mois.

« L’anglais » se charge de la calligraphie

A mon retour, « l’anglais » se met au travail armé de sa petite radio, de son stylo et de ses rouleaux de scotch.
Sa technique est simple, il va former une sorte de pochoir géant. Pour commencer, il colle des bandes de ruban adhésif afin de faire un grand rectangle, puis il le divise en 6 petits carrés qui contiendront une lettre chacun. Les formes arrondies du O et du R sont découpées à l’aide d’une petite lame de rasoir.

J’admire le travail prendre forme petit à petit, « l’anglais » est vraiment doué dans son job. Je tiens à préciser que tout est fait à l’œil sans mesurer quoique ce soit et pourtant ça semble plutôt régulier ! La peinture n’a pas été appliquée mais on peut déjà se faire une idée du résultat ! Le même procédé est utilisé de l’autre côté de la voiture.

Il attaque ensuite l’avant de la voiture. Je lui ai demandé d’inscrire « Volume 1 : West Africa » ce qui lui donne un peu plus de mal à cause de la courbure du capot.

L’AX méconnaissable : résultat bluffant !!

Pendant ce temps Karim, qui a terminé de peindre, prend un peu de repos affalé sur une banquette arrière qui traine au milieu de la cour du garage.

Une fois que « l’anglais » a fini sa part du boulot, l’apprenti scotch du papier journal autour des pochoirs géants et met un petit compresseur en marche.

Karim s’arme alors à nouveau de son pistolet à peinture.
Il n’y a qu’un seul réservoir disponible et il n’est pas propre à l’heure qu’il est. Il découpe donc un bidon en plastique et y met un peu de peinture jaune. Au moment de vaporiser, il met le pistolet directement dans le morceau de plastique et remplit la partie supérieure des lettres. Il ajoute ensuite de la peinture rouge afin d’obtenir du orange et s’occupe de la partie inférieure en réalisant un dégradé entre les 2 couleurs.

Pour fignoler tout çà, les jantes en taule sont lavées et peintes avec des triangles alternés de violet et de gris.

On laisse sécher un petit quart d’heure et une fois tout le scotch retiré, je reste limite sans voix tellement le résultat final est magnifique, jamais je n’aurais imaginé un rendu aussi net !!! C’est du grand art !!

Moi qui ne passais déjà pas inaperçu avec ma petite voiture immatriculée 69…

Un grand grand merci à toute l’équipe.